La Porte d’Ulysse s’est ouverte ce lundi


La Porte d’Ulysse s’est ouverte ce lundi

Mehdi Kassou sait que les 80 lits de Haren ne seront pas suffisants et appelle toujours à la générosité des Bruxellois. – Pierre-Yves Thienpont/Le Soir.

En face du Décathlon d’Evere, les anciens bureaux dits Blue star reprennent vie. Au 1426 de la chaussée d’Haecht, la Croix-Rouge a déjà installé son matériel pour accueillir des sans-abris dans le cadre du plan hiver fédéral. Dans le même immeuble, une petite porte sur le côté donne accès au nouveau centre pour les migrants géré par Médecins du Monde et la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés, rebaptisé la Porte d’Ulysse, en hommage à un jeune garçon décédé le 18 novembre dernier. « On doit faire le tour car ils ont mué pour que le bâtiment puisse être loué à deux occupants », explique-t-on une fois la porte de secours passée. Tout un symbole pour ces associations qui pourtant ont le même but : ne laissez personne dormir dehors durant l’hiver.

Dans la zone réservée à la Plateforme Citoyenne, le chauffage n’a pas encore été allumé en ce lundi. Les premiers migrants n’arriveront que le soir, et toutes les économies sont bonnes à faire. Médecins sans frontières a déjà installé les lits. Sur les quatre plateaux qui accueillaient autrefois des ordinateurs, on retrouve maintenant 20 lits. En tout, le centre peut donc héberger 80 personnes.

« Ce n’est évidemment pas suffisant, explique Mehdi Kassou, représentant de la Plateforme Citoyenne. Pour la nuit de dimanche à lundi, nous avons placé 420 personnes dont 16 seulement ont pu se rendre au Samusocial. Nous pensons que parmi ce groupe, environ 350 sont des migrants en transit, mais nous ne faisons pas de distinction. Ces personnes ont été logées majoritairement chez les bénévoles et les derniers ont été placés vers 1 heure du matin.»

Cela fait trois mois que les citoyens se sont regroupés pour fournir un toit et un repas le temps d’une nuit ou plus. Et avec l’hiver, les bénévoles savaient que la demande allait devenir plus importante. En plus, les accueillants ne peuvent pas toujours prendre quelqu’un chaque soir. « Cela va permettre de soulager les familles mais nous savons très bien que 80 places ne seront pas suffisantes. Mais avec le budget que nous possédons, impossible de faire mieux. Nous avons toujours besoin de personnes pour accueillir les migrants. »

Vu le nombre de places, ce sont donc les personnes les plus fragiles qui seront prioritaires pour venir y dormir. Pour disposer du bâtiment jusqu’au 30 avril, la Ville de Bruxelles loue le bâtiment à Citydev (l’organisme régional de développement urbain ) pour un montant de 60.000 euros auquel il faut ajouter les 18.825 euros de charges forfaitaires. Le CPAS de la Ville se chargera du linge et du transport des migrants jusqu’au centre. Pour le reste, la Plateforme a bénéficié d’un don de 25 000 euros de Médecins du Monde et travaille avec Belgium Kitchen, Serve the city, Cuistots solidaires et le collectif Deux euros cinquante pour les repas.

« Nous avons demandé de l’aide auprès de la Région bruxelloise, rappelle Mehdi Kassou. Nous avons envoyé plusieurs courriers au ministre-président Rudi Vervoort (PS) ainsi qu’une pétition de 10 000 signatures, mais nous n’avons eu à ce jour aucune réponse. En attendant, nous avons levé 15 000 euros de dons pour ouvrir le centre et surtout pour installer des blocs de douches à l’extérieur du bâtiment. »

Avec cette infrastructure pérenne pour les cinq prochains mois, la Plateforme risque de devenir un acteur plus formel du secteur de l’accueil. Or, personne n’est un professionnel. En tout, ce sont des centaines de bénévoles qui se relayeront chaque soir pour amener, loger, servir un repas chaud le soir et un petit-déjeuner au migrants. Un appel au dons devra être relancé car en comptant 2,50 euros par repas, la Plateforme pour tenir 28 jours.

Article publié sur Le Soir, le 12 décembre 2017